Le vendredi 16 mars 1973
Ce jour-là, j'avais un cours de rattrapage d'un professeur absent, de 15h00 à 16h00, ce qui m'empêchait de voir le premier épisode de "Chapeau melon et bottes de cuir": "Bons baisers de Vénus" (alors qu'actuellement mes cours le vendredi finissaient à 15h00).
L'épisode commençait à 15h15 et se terminait à 16h00.
Je décidai donc de me rendre au centre de ville de Montélimar pour acheter le 45t de la chanson découverte le samedi précédent, "Tri Martolod", par Alan Stivell.
Il y avait en 1973 un grand magasin "Les établissements Abadie", représentant la marque Philips. Il fallait une vingtaine de minutes à pied pour rejoindre le centre ville.
Ce dont je ne me souviens plus, c'est si j'étais à pied ou en vélo, puisque j'allais au collège en vélo, mais il me semble bien que c'était à pied.
Au disquaire, je trouvai sans problème le 45t et je sortis du magasin. Juste en face, il y avait un libraire catholique. Je ne fais pas de publicitié puisque tant la librairie que les établissements Abadie n'existent plus depuis des années.
Je m'approche de la vitrine du libraire, et soudain mon coeur se met à battre très fort dans ma poitrine.
Voici ce que je vois en vitrine, moi qui disposait du livre de Druon "La reine étranglée" en livre de poche.
Il y avait six livres grand format, à 28 francs pièce. Le roi de fer avait pour illustration une photo de Georges Marchal, le second, vous l'avez sous les yeux, le troisième Georges Ser, le quatrième José Maria Flotats, le cinquième Geneviève Casile, et je ne me souviens plus de la photo illustrant "Le lis et le lion", sans doute Jean-Louis Broust.
J'étais pétrifié. Muriel en vitrine. 28 francs était une grosse somme pour l'époque. Je ne l'avais pas sur moi. Il me faudrait revenir le lendemain samedi matin. Jour de ma fête, le 17 mars, où mes parents m'offraient un cadeau, mais ma passion pour Muriel étant secrète, j'allais acheter ce livre relativement épais en cachette.
Je crois que l'état dans lequel j'étais, fébrile, bouleversé, émerveillé tout à la fois, m'a fait comprendre que l'amour que portais à Muriel Baptiste dépassait tout ce que je pouvais imaginer.
Je suis resté longtemps devant la vitrine. Je ne me rappelle pas avoir réservé le livre, mais le lendemain, il était en ma possession.
Cette édition datait de 1972 chez Plon/Del Duca et est resté très peu de temps en vente. Quelques années plus tard, "La reine étranglée" existait encore en grand format, broché, mais sous une simple reliure bleue pour bibliothèque.
Bien évidemment, les programmes télé ne m'ont guère intéressé, car j'étais sur mon nuage.
La 2 proposait à 19h30 le sixième épisode de "Anna et le roi" : "Education de prince". Sur la Une, à 20h15, le huitième épisode des "Messieurs de Saint Roy", et à 20h30, les adieux à Columbo avec "Le spécialiste".
Entre temps, tournait sur mon électrophone le disque d'Alan Stivell. C'est pourquoi "Tri Martolod" reste lié à Muriel Baptiste.
J'aimais Muriel depuis la première diffusion de "La Princesse du rail" en 1967, et c'était reparti avec la double programmation en juillet 1972 (Nous y viendrons sur ce blog) de juillet 1972 (La princesse/Richard Lagrange). Mais jamais je n'avais réalisé à quel point je l'avais dans la peau avant ce mémorable 16 mars 1973.
Aujourd'hui, cette rue de Montélimar a bien changé et est méconnaissable, seule reste l'église Sainte Croix (un peu avant le magasin de disque qui n'existe plus).. La rue s'appelle d'ailleurs la rue Sainte Croix, donnant sur la place du marché. Le disquaire et le libraire se trouvaient à l'extrêmité de la rue Sainte Croix, avant d'être latéralement traversés par la rue des 4 alliances.